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mardi, mars 19, 2024

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Sincérité budgétaire: Encore du chemin à faire

Noureddine Bensouda ne perd pas de temps. Alors que l’administration publique était en congé, le patron de la Trésorerie générale du royaume (TGR) organisait une conférence-débat consacrée aux «finances publiques à l’ère de la sincérité des budgets et des comptes publics» samedi dernier(1).

Pour lui, le principe de sincérité exige que les documents budgétaires et comptables se rapportant aux prévisions et à l’exécution, fournissent toutes les informations notamment aux citoyens, au Parlement et à la société civile. L’objectif est de leur permettre une bonne lisibilité des finances publiques, une meilleure appréciation des risques et une prise de décision en temps opportun. A cela s’ajoutent la reddition des comptes et l’évaluation des politiques publiques.

Par ailleurs, l’obligation de la sincérité budgétaire, chez les anglo-saxons, où on parle plutôt de transparence, est tributaire de plusieurs conditions. D’abord, les prévisions budgétaires doivent être exactes, exhaustives et correspondre aux besoins réels de l’Etat pour lui permettre de produire des biens et des services de qualité et d’honorer toutes les dettes.

Lors de son exposé, Noureddine Bensouda s’est interrogé sur «la sincérité des dernières lois de finances dès lors qu’elles ne tiennent pas compte des demandes de remboursement de la TVA et de la restitution de l’IS qui ont atteint respectivement 33,2 milliards de DH et 3,9 milliards à fin décembre 2017». Idem pour les dépenses du personnel réalisées en 2018, estimées inférieures de 2,9 milliards de DH par rapport aux prévisions.

Ensuite, la 2e condition a trait aux crédits qui doivent être suffisamment détaillés pour permettre au Parlement de connaître la véritable destination des dépenses et lui faciliter ainsi le contrôle d’exécution du budget. Dans la réalité, l’argentier du Royaume se limite à exposer devant les deux commissions des finances du Parlement l’état d’avancement de l’exécution du budget en cours. A cette occasion, il aborde de manière sommaire les grandes lignes de la prochaine loi de finances.

Puis l’autre condition a trait à la limitation de la débudgétisation des ressources et des charges de l’Etat. En effet, les comptes spéciaux du Trésor (CST) et les Segma ne permettent pas une meilleure lisibilité des prévisions et de l’exécution. Selon Noureddine Bensouda, les évaluations des recettes et des dépenses des CST sont présentées de manière globale et par compte spécial, sans aucun détail. «En 2019, les recettes prévues au titre des CST représentent 25% des recettes globales de l’Etat, hors recettes d’emprunt et les charges des CST constituent 21% de la totalité des dépenses, hors remboursement du principal de la dette», dit-il.

Même s’il est intervenu en dernier, Mohamed Bastaoui, président de la 2e chambre de la Cour des comptes, a été fortement applaudi par l’assistance. Il reconnaît toutefois que l’appréciation de la sincérité du budget est une nouveauté pour la Cour. Cette dernière peut s’en charger à deux occasions. La première, au moment de l’examen du projet de loi de finances (PLF) par le Parlement.

Ainsi, la Cour des comptes peut intervenir mais à la demande du pouvoir législatif. Or, au Maroc, cette institution n’est pas encore sollicitée par les députés pendant l’examen du PLF. La deuxième occasion intervient au moment de l’examen du projet de loi de règlement (PLR). Il est à préciser que la Cour contrôle a posteriori l’exécution de la loi de finances.

En plus, le rapport est élaboré deux ans après l’adoption du budget. Dans ce cas, «l’appréciation de la sincérité budgétaire n’est plus d’actualité et perd son utilité. D’autant que les PLR suscitent moins d’intérêt dans le débat public que les PLF », note le magistrat. Celui-ci relève que les priorités stratégiques arrêtées au moment de l’élaboration du PLF se perdent en cours de route.

«Leur traduction effective dans le budget de l’Etat reste encore à améliorer», ajoute-t-il. Sur la sincérité comptable, elle ne dispose pas d’assez de recul pour porter une appréciation objective. Mais, le chantier étant en préparation, les aspects qui intéressent actuellement cette nouvelle mission portent  sur le portage politique du projet, les normes comptables, le bilan d’ouverture, le contrôle interne et les systèmes d’information.

Quant à Abdelali Doumou, économiste, il a considéré que la qualité du service public n’a pas suivi les efforts de l’Etat en matière de dépenses d’investissement. «Au contraire, l’essor de l’investissement public semble paradoxalement accompagner un processus d’affaiblissement de la capacité institutionnelle de l’Etat territorial face aux demandes sociales croissantes, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’emploi», souligne l’ancien député de l’USFP, aujourd’hui au PPS. Pour convaincre, il cite les 1.550 audits de performance des organismes publics effectués par la Cour des comptes et qui ont révélé de nombreux dysfonctionnements.

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