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Le début de quelque chose ?

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Toute la nation est fière des réalisations de l’équipe marocaine pendant cette Coupe du monde de football. Et c’est un événement heureux. Cet exploit a montré que la réussite émane d’abord d’un état d’esprit. Qu’elle est la suite, presque logique, d’un mental décomplexé, prêt à s’approprier collectivement le destin commun d’une équipe et d’une nation. Prêt surtout à être créatif et à s’exprimer librement, sans peur de l’échec ou d’autre chose. Une réussite qui vient des tréfonds de l’esprit, d’une vision, d’une politique et d’une culture de discipline, de rigueur et d’une fierté constructive d’être Marocain.

événement qui inspire un lyrisme parfois trop lyrique
Cependant, ce qui devait arriver arriva. Un tel événement historique donne forcément naissance à un lyrisme parfois trop lyrique. D’aucuns sont allés jusqu’à suggérer que cette demi-finale entre le Maroc et la France constituait une confrontation ultime qui provoquerait un changement radical dans les relations internationales entre anciennes colonies et anciens colonisateurs. D’autres affirment que le Maroc a fait (re)découvrir au monde son pan-nationalisme, son panafricanisme et son panarabisme… en même temps que sa profonde amazighité et même la place des mères dans le destin de leurs progénitures de joueurs. D’autres encore comparent ce Mondial qatari à un Bandung bis, une rencontre des proscrits ouvrant une lucarne pour les laissés-pour-compte. La liste n’est pas exhaustive, il y a eu également des références à «Tarek ibn Ziyech», à la bataille de Zellaka ou celle des Trois Rois et j’en passe. Rien que ça! Nous revenons de très loin…
À présent que le mental des Marocains est rétabli par une reconnaissance mondiale, nous pouvons désormais prétendre, avec fierté, jouer dans la cour des grands. Si cet événement peut provoquer, à travers une psychanalyse de groupe, une guérison du sentiment d’infériorité et du complexe d’autodénigrement, ce sera déjà ça de gagné. Les Marocains intérioriseraient une prise de conscience qu’ils pourraient, en quittant le déni ou l’évocation permanente du passé, capitaliser sur cette leçon pour avancer dans tous les autres domaines. Remplaçant ainsi la culture du fatalisme par une culture de réussite, de rigueur et de discipline. Le patriotisme béat céderait alors la place à une citoyenneté active, constructive et collective. Le sport aura également aidé à prouver que la solution viendrait d’un changement d’état d’esprit, de comportements et d’habitudes. Donc de culture.

C’est un très bon début, mais il ne faut pas lâcher
Le développement économique des pays dépend du capital humain. Lequel comprend, selon la définition de la Banque mondiale elle-même, la confiance dans les institutions et dans les autres. Ajoutons à cela la confiance en soi que générerait cet exploit, et nous deviendrons les rois du monde.
C’est un très bon début, mais il ne faut pas lâcher. Que le pays profite de cet élan pour installer quelque chose de plus structurant et durable avec des comportements utiles à son développement : rigueur, discipline, reddition des comptes, une culture du travail bien fait, la honte du travail bâclé… ou bien nous reviendrions, encore, dans deux, dix ou vingt ans, à l’évocation nostalgique d’un passé glorieux, le jour où l’équipe marocaine a été demi-finaliste à la Coupe du monde de 2022 !
Nous avons raison de fêter notre équipe marocaine et son exploit. Nous avons raison d’être fiers de ce qui vient de se passer. Toutefois, gardons la tête froide. Dans le meilleur des cas, le travail ne fait que commencer, si nous le commençons.