Avant même le début de la compétition, une grande partie des affiches les plus attendues est déjà complète, tandis que certains matchs à élimination directe affichent « sold out » alors même que les équipes qualifiées ne sont pas encore connues. Sur la plateforme officielle de la CAF, il ne reste que quelques billets pour des rencontres jugées moins attractives. Sur les réseaux sociaux, des vidéos devenues virales montrent des spéculateurs mobilisant des dizaines de smartphones pour rafler les billets, sous le regard impuissant des fans. Pourtant, pour cette édition de la CAN, la CAF a mis en place un dispositif beaucoup plus strict : billets nominatifs liés à un Fan ID, digitalisation totale du processus, limitation du nombre d’achats à quatre billets par match et trente par utilisateur et autant de mesures destinées à casser la dynamique de la spéculation. Mais interdire la revente via des canaux parallèles suppose aussi d’offrir une alternative légale, simple et crédible. C’est précisément dans cette logique que la CAF s’apprête à lancer une plateforme officielle de revente, permettant aux acheteurs empêchés d’assister aux matchs de revendre leurs billets exclusivement via ce canal. Les règles ne sont pas encore totalement connues, mais l’objectif est de couper l’herbe sous le pied des spéculateurs tout en apportant une solution aux supporters. Reste à savoir si le Comité d’organisation est suffisamment blindé pour cadrer les prix ou assistera-t-on à un simple transfert du marché noir vers un circuit « légal », avec les mêmes tarifs excessifs…
Car si la revente des e-billets peut être, louablement, contrôlée via une application, le partage de comptes Fan ID -pratique bien ancrée au Maroc, notamment sur les plateformes Play Station et Xboxpourrait ouvrir une nouvelle brèche pour les spéculateurs. La réussite du dispositif reposera donc, non seulement sur la digitalisation, mais également et surtout sur la rigueur des contrôles à l’entrée des stades et sur la capacité des autorités à traquer et sanctionner les revendeurs illégaux en ligne, à l’image des méthodes d’investigation utilisées par le fisc en France pour traquer l’évasion fiscale.
Il est vrai que le Mondial 2022 au Qatar a montré qu’un système officiel de revente pouvait fonctionner, malgré quelques dérives. Mais le contexte marocain est différent et beaucoup plus complexe, avec des circuits informels bien rodés et une forte culture de la débrouille. Et dans cette configuration, le digital peut limiter la spéculation autour de la très attendue Coupe d’Afrique, à condition toutefois qu’une coopération interdépartementale permette de colmater les failles, parfois minimes, par lesquelles les spéculateurs parviennent à s’infiltrer sur le marché.
