L’avenir du développeur web est-il mis en péril par l’intelligence artificielle ? Un métier pourrait donc être à la fois «tendance», convoité par les entreprises… mais dont les jours sont déjà comptés.
Le métier de développeur web a le vent en poupe. Depuis les années de la bulle internet, entre 1990 et 2000, et depuis 2005, les entreprises qui opèrent leur transformation digitale se les arrachent. Si bien que sur le marché du travail, le développeur est un profil rare.
La pénurie dure depuis plusieurs années. En matière de formation, l’offre s’est donc très largement élargie pour satisfaire la demande. «Apprendre à coder est devenu une obsession, explique au Figaro Noël Paganelli, patron de «La Capsule Academy», une école de code lyonnaise.
Jeunes diplômés d’écoles de commerce, actifs de 30-35 ans en reconversion… L’attrait pour le code et le métier de développeur ne cesse de s’accroître.»
Développeur web, le métier de demain? Si l’on en croit la demande des entreprises et les salaires – parfois mirobolants – que l’on propose pour ce poste, il est fort aisé de le croire…
Dans une étude dévoilée par LinkedIn en 2016, on constate que les profils de ceux qui savent coder, développer, programmer et vendre occupent les premières places du «top 20» des métiers les plus recherchés sur le réseau social professionnel.
Et pourtant, «développeur» fait partie de ces métiers qui ont le vent en poupe mais dont l’existence est d’ores et déjà mise en péril par l’intelligence artificielle.
Paradoxal? «La machine de l’IA est en marche, et l’on sait que cette pénurie de développeurs est provisoire», précise Noël Paganelli, qui cherche à anticiper les dégâts que vont causer l’IA à son offre de formation… en même temps qu’il la développe! «On sent le vent tourner.
Et on réfléchit pour s’armer le mieux possible afin d’humaniser notre travail et amplifier la partie créative», précise-t-il.
– Quel degré de créativité pourra atteindre l’IA?
«Humaniser son travail.» Et se demander quelle tâche peut être copiée par l’IA et quelle tâche ne peut – a priori – pas l’être.
«La vérité est grise, explique au Figaro Philippe Silberzahn, professeur à l’EM Lyon et chercheur associé à l’École Polytechnique.
Beaucoup d’aspects du codage vont être automatisés, et donc penser que «tout le monde doit apprendre à coder» me semble idiot, même si une culture du codage est intéressante et utile, tout comme une culture classique. Mais à mon avis, il restera toujours des domaines où la créativité du codeur sera nécessaire.
C’est d’ailleurs vrai, je crois, dans tous les domaines.» Tout ce qui est lié à la créativité fait effectivement partie des plates bandes sur lesquelles l’IA interviendra plus difficilement.
– Lire aussi: Intelligence artificielle: quand Elon Musk s’alarme de ses propres créations
La question est donc: jusqu’où va pouvoir aller l’IA en matière de créativité? «Un développeur ne fait pas que du code, il travaille en équipe, il réfléchit au sens de son travail…
Ce sont plus que des tâches purement automatisables», observe Noël Paganelli. Même analyse pour Philippe Silberzahn, qui explique avec bon sens qu’un informaticien «doit réfléchir à son algorithme avant de coder.
Comme toujours, dès qu’on rentre dans la véritable nature de ce que FAIT un expert, on s’aperçoit que les possibilités d’automatisation complète diminuent.»
Pourtant, certaines expériences montrent d’ores et déjà que l’IA faible est capable de création: dès 2015, AlphaGo – une IA développée par une filiale de Google – a battu le champion européen du jeu de Go avec un score sans appel: 5 à 0.
En 2017, la même IA a battu cette fois-ci Ke Jie, le champion du monde.
Un résultat qui démontre que l’expérience et l’intelligence humaine acquise depuis des millénaires n’a pas suffi à déjouer l’intelligence artificielle.