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jeudi, mars 28, 2024

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Contrat de travail et Covid-19

Dans le contexte actuel de la pandémie du coronavirus, employeurs et salariés se posent de nombreuses questions sur les relations de travail. La commission Etudes fiscales et juridiques du Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables de Casablanca et Sud a organisé, mardi 19 mai, un webinaire consacré au code du travail dans le contexte Covid-19.

Trois intervenants se sont succédé: Ahmed Daouli, directeur du cabinet du ministre du travail, Redouane Naciri et Saad Karim Belfaqir, tous deux experts-comptables. Les questions des participants étaient nombreuses: sort du contrat de travail, réduction de salaire, congé payé, abandon de poste… Le code du travail n’apporte pas toujours de réponse.

■ Que devient le contrat de travail pendant la pandémie?
La loi 25-20 a introduit la notion d’entreprise en difficulté sur la base de la baisse du chiffre d’affaires, du nombre de salariés… Un alinéa qui se rajoute à ceux prévus par l’article 32 du code du travail sur les conditions de suspension provisoire du contrat de travail (service militaire, maladie ou accident, accouchement, grève…). Par conséquent, et conformément au décret d’application de la loi 25-20, un employeur peut imposer l’arrêt temporaire du travail à des salariés et les déclarer à la CNSS pour bénéficier de l’indemnité forfaitaire Covid, à condition de ne pas figurer sur la liste négative.

■ Le congé sans solde? Nulle part dans le code
La notion de congé sans solde n’a pas été prévue par le code du travail et n’est réglementée par aucun régime juridique. Un employeur ne peut donc mettre son personnel ou une partie de son personnel de manière unilatérale en congé sans solde. Cependant, une entreprise en difficulté peut négocier avec un ou plusieurs salariés la possibilité de prendre un congé sans solde. L’accord du salarié est indispensable.

■ Peut-on imposer le roulement au personnel?
Le travail par roulement (article 187 du code du travail) est une organisation qui permet à une entreprise de rester ouverte sans que chaque salarié qui s’y trouve occupé ne dépasse la limite maximum légale de la durée hebdomadaire de travail. Par roulement, toujours dans le même article, il faut entendre une organisation du travail avec des équipes tournantes sur la base de la non-simultanéité des repos des salariés dans le cadre de la même journée. Les deux modes d’organisation sont interdits sauf dans les entreprises où cela est justifié par des raisons techniques. Dans ce cas, l’employeur doit au préalable consulter les délégués du personnel ou le comité d’entreprise pour les structures qui comptent au moins 50 salariés. Il doit également en aviser l’Inspection du travail. Le programme doit être clairement affiché dans les locaux du travail.
n Suspension d’indemnités, est-ce possible?
Cette question n’est pas tranchée. Les éléments de rémunération tels que l’indemnité de transport, la prime de représentation, la prime de panier sont généralement considérées comme un acquis pour le salarié. Avant de procéder à leur suspension ou leur réduction, il faut toujours se concerter avec le salarié «pour un juste milieu» pour éviter tout litige. Mais c’est souvent difficile, conviennent les experts.

■ Le personnel domestique et l’indemnité Covid-19
La loi 25-20 ne fait pas de distinction entre les salariés et autres stagiaires Anapec. Par conséquent, tant qu’ils ont été déclarés à la CNSS en février 2020, les employés domestiques sont éligibles à l’indemnité Covid-19 à condition que l’employeur ne figure pas sur la liste négative. C’est la commission ad hoc qui statue sur la baisse du chiffre d’affaires et donc l’éligibilité.

Par peur, un salarié refuse d’aller au travail: Que faire?

UN salarié, par peur de contracter le coronavirus, peut-il s’abstenir de se rendre à son travail ? Cette attitude peut-elle être assimilée à un abandon de poste? En fait, il s’agit d’un droit de retrait qui, à l’inverse de la France, n’est pas prévu par la législation marocaine. Du coup, le salarié s’expose à un licenciement légal. Il est entendu que le Maroc a ratifié la Convention n°155 sur la sécurité et la santé des travailleurs. Toutefois, un salarié ne peut décider de son propre chef de refuser de se rendre sur le lieu de travail. C’est un «mouvement organisé». Le droit de retrait doit donc être exercé de manière collective par plusieurs employés. En l’absence de dispositions réglementaires, il est toujours conseillé d’en référer à l’inspecteur du travail et d’apporter la preuve que l’accès au travail présente un danger. Ce qui permet  d’échapper aux dispositions relatives à l’abandon de poste prévues à l’article 271 et suivants du code du travail.

                                                                            

AT ou maladie professionnelle?

La question fait encore l’objet d’un débat de par le monde. Le chef du cabinet du ministre du Travail confie qu’il existe en fait «trois écoles distinctes» et chacune a ses propres arguments. La première consiste à considérer la Covid-19 comme un accident du travail, la deuxième, une maladie professionnelle et la dernière le qualifie de maladie ordinaire comme le rhume.

L’article 3 de la loi 12-18 définit un accident du travail comme étant tout accident soudain causant une invalidité partielle survenu pendant l’exercice du travail.

Difficile d’assimiler la Covid-19 à une maladie professionnelle qui suppose une longue exposition à des substances toxiques ou nocives sur le lieu de travail. Ce qui n’est pas le cas du coronavirus. D’autant que les ministères du Travail et de la Santé ont établi une liste des maladies professionnelles.

Le troisième courant d’idées milite pour que la Covid-19 soit considérée comme une simple maladie. La qualification du cette maladie reste freinée par le volet indemnisation. Les accidents du travail et les maladies professionnelles restent du ressort des compagnies d’assurances selon les contrats qui les lient avec leurs clients, tandis que les maladies «simples» sont prises en charge par la CNSS dans le cadre de la suspension du contrat de travail, certificat médical à l’appui. Le débat reste donc ouvert sur la qualification de la maladie et les tribunaux devraient s’attendre à être inondés de litiges à ce sujet.

Par Hassan EL ARIF  | L’économiste Edition N°:5766 Le 21/05/2020

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