– Conseil : Le télétravail présente des défis pour le manager qui doit savoir maintenir la cohésion des équipes à distance. Qu’avez-vous à nous dire à ce propos ?
Imane Hadouche : Pour répondre à votre question, je dirais qu’il est déjà difficile de maintenir la cohésion des équipes dans des circonstances sans challenges particuliers, et ça l’est évidemment plus par temps de crise ou lors de changements. Ainsi, quand on parle de «distanciel», cela implique la notion de distance.
Or, il faut savoir que la distance installée dans n’importe quelle relation n’aide pas vraiment à souder les liens. Bien au contraire, la distance peut dissoudre des liens solides, ou du moins installer une sorte de détachement dans le meilleur des cas, ou encore édifier des barrières dans le pire des scénarios. Autant dire qu’«isolement» et «cohésion» sont complètement antinomiques.
– Parmi les difficultés que l’on peut rencontrer figure le conflit à distance. Peut-on affirmer que les malentendus sont encore plus difficiles à gérer à distance qu’en présentiel ?
Non seulement il est difficile de gérer les malentendus à distance, mais les conflits sont plus fréquents et plus exacerbés par la distance.
La communication devient moins fluide et moins efficace parce qu’on perd tout le volet non verbal et para-verbal, qui forme tout de même 90% d’une communication.
De ce fait, un malentendu peut rapidement escalader. La perte de ce volet non verbal et para-verbal et les échanges exclusivement virtuels font aussi perdre le côté humain, convivial et chaleureux, ce qui impacte naturellement la qualité de l’entente entre les collègues.
Et c’est pour ces mêmes raisons qu’il est plus compliqué pour un intervenant de résoudre un conflit ou arranger des accords et des compromis.
– Concrètement, comment résoudre à distance un conflit entre deux collaborateurs ?
Pour résoudre à distance un conflit entre deux collaborateurs, il existe deux cas de figure :
• Le premier cas implique que le manager sait par les faits qu’une seule personne est à l’origine du conflit et en porte toute la responsabilité par ses actes.
À ce moment-là, le moyen le plus efficace pour résoudre le conflit serait d’organiser un entretien individuel avec la personne concernée, lui relater les faits et expliquer les attentes par rapport à la situation. En cas de récidive, mieux vaut organiser une réunion de recadrage.
• Le deuxième cas renvoie à un conflit où les deux protagonistes ont participé à alimenter l’hostilité, auquel cas, programmer un entretien individuel avec les deux, suivi d’une réunion collective où les deux parties seront avisées des faits, des conséquences et des attentes.
Lors de cette réunion, il est important de focaliser sur les faits et de refuser d’accueillir tout ce qui relève du jugement ou du sentiment et il est nécessaire aussi d’éviter de viser une partie ou revenir sur les justifications et les reproches.
Il est ainsi recommandé de rester complètement orienté «solution» et recadrer les échanges s’il le faut pour revenir vers une solution qui permet de résoudre le conflit et avancer.
– Quelles sont les astuces que vous préconisez pour éviter de tomber dans
une telle situation ?
Depuis le début du confinement, plusieurs entreprises ont trouvé le moyen d’organiser des journées «cohésion» à travers une plate-forme ou une application.
C’est le même principe qu’un team building sauf que cela se passe virtuellement, en une demi-journée et de manière régulière.
L’idée est de partager une activité non professionnelle animée par un professionnel. Le fait de pouvoir échanger et se confier, de manière chaleureuse et complice, permet de souder les liens et de fluidifier les communications.
Un manager pourrait aussi travailler avec ses équipes sur un projet de «Charte du distanciel» qui rassemblerait les valeurs vitales pour eux, un ensemble de règles de vie à respecter et un seuil de ce qui est totalement inacceptable.
On peut aussi avoir recours au «Mur des honneurs» : sur n’importe quelle application, créer un espace d’échange et, chaque semaine, choisir un collègue pour le mettre sur le podium.
Tous les autres collègues seront invités à lui attribuer une qualité qui définit ce qu’ils apprécient le plus chez lui. Vous l’aurez compris, il suffit de trouver un moyen créatif et adapté pour nourrir les liens humains, car le virtuel peut rapidement isoler et faire oublier les chaleureux moments partagés pendant la fameuse pause café.
Source : LE MATIN
Rédigé par : Nabila Bakkass
